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fabrice bonnifet

Yannick Servant de la Convention des Entreprises pour le Climat m'a posé la question suivante : De quoi avons-nous besoin pour que l'abondance frugale devienne le nouveau logiciel du monde économique ?

Disons le clairement nous n’avons pas d’autre choix que de :

- ralentir la production à l’attention de ceux qui ont trop, pour permettre à ceux qui n’ont pas assez et même rien d’avoir un peu. Autrement dit ralentir par la régulation le non essentiel d’une minorité sur la planète pour préserver l’essentiel de tous. Le dogme de la croissance infinie de tout et n’importe quoi, pourvu que cela croisse doit être remis en question sans délai.

- mettre le génie humain au service de la sobriété en fixant comme seuils indépassables les 9 limites planétaires.

Oui à l’

innovation

sans effet rebond qui fait baisser en absolu les émissions de

co2

et qui protège le vivant. C’est cela le techno discernement.

- revoir nos récits de la réussite. La métaphore sportive du plus vite, plus haut, plus fort de la compétition exacerbée ne peut plus être le discours dominant dans les entreprises. Là où la compétition élimine, la

collaboration

crée. L’abondance frugale c’est avant tout le partage et la mutualisation de ce qui va devenir rare (l'eau, les ressources, l'énergie...). Le modèle économique des entreprises régénératrices sera forcément basé sur l’intensité d’usage de produits durables et donc sur l’économie de la fonctionnalité. La véritable liberté, c’est de pouvoir jouir de tout, sans forcément tout posséder. Nous devons faire advenir l’idée que chacun est co-propriétaire des déterminants du vivant, c’est la meilleure façon d’avoir conscience de sa valeur.

- lutter contre les sophismes du techno solutionnisme, de la croissance verte, du découplage qui n’ont comme seul effet de laisser croire que tout peut continuer comme avant, sans rien avoir à modifier dans nos comportements. Aucune

technologie

magique ne nous sauvera de l’effondrement en cours, et quand bien même elle serait inventée demain, son temps de diffusion ne permettra pas d’obtenir des résultats à la hauteur des enjeux. Les solutions pour produire le monde frugal existent déjà. Les innovations de rupture dont nous avons besoin doivent être organisationnelles et associées à la gouvernance des entreprises et des territoires. Osons la cooptation de

leaders

inspirants pour en finir avec les individus "brillants" mais déconnectés de l’essentiel. Déployer un concept organisationnel novateur est beaucoup plus rapide qu’une innovation matérielle.

- évaluer autrement la performance. L'adoption universelle d'un système comptable multi capital est hélas irréaliste dans le temps qu’il nous reste pour agir. Faisons de la CSRD l'outil du pilotage des trajectoires des

entreprises

pour tendre vers le net zero impact négatif. Les rémunérations des dirigeants tous doivent être corrélées au stricte respect de ces trajectoires. Eric Duverger Collège des Directeurs du Développement Durable (C3D)

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